Financement participatif : un outil au service des territoires ?
Le 31 mars dernier a marqué la fin du Grand Débat sur la transition énergétique mené depuis plusieurs mois par Nantes Métropole. Au sein de cette riche expérience est née la Communauté des Activateurs, des porteurs de projet motivés pour intégrer le financement participatif et la mobilisation des citoyens au développement de leur projet.
Nous avons été sélectionnés pour les accompagner dans cette démarche et faisons aujourd’hui un petit bilan de cette aventure collaborative !
Les collectivités ne sont pas en mesure de porter à elles seules l’ensemble des projets du territoire à la hauteur des enjeux actuels. Il faut donc trouver des moyens de soutenir tous ceux qui portent des solutions et de mobiliser les citoyens autour de ces projets. C’était l’objectif de l’expérimentation menée par les Activateurs, une expérimentation unique en France et un réel pari initié par Nantes Métropole.
Quand financement participatif rime avec accompagnement
Le point d’orgue de ce dispositif fut la phase d’accompagnement, à la fois collective et individuelle, proposée aux 10 porteurs de projets. Cela nous a semblé indispensable pour démultiplier l’impact de soutien financier de la collectivité car peu de porteurs de projet avaient les compétences ou les moyens de se lancer et de réussir leurs campagnes seuls.
Cet accompagnement a porté ses fruits, car plusieurs campagnes ont été validées avec succès et d’autres sont en passe de se concrétiser. A l’heure actuelle, ce sont plus de 1 600 contributeurs sur l’ensemble des campagnes et près de 60 000 € collectés… et ce n’est que le début !
Un bousculement des codes institutionnels
Comme dans toute expérimentation impliquant des acteurs publics, un des principaux enjeux a été de dépasser les contraintes institutionnelles, notamment au niveau administratif et comptable : aujourd’hui, une collectivité ne peut pas soutenir directement un projet via une plateforme de financement participatif. Une solution a pu être trouvée pour pouvoir soutenir financièrement les associations sélectionnées mais pas pour les entreprises, pour lesquelles les contraintes sont plus importantes (nous vous invitons d’ailleurs à découvrir la campagne d’Enerpro, la seule entreprise accompagnée dans le cadre du dispositif).
Comme le témoignent Anne-Line et Maxime, les agents de Nantes Métropole au coeur du dispositif : “Pendant 5 mois d’accompagnement, ce sont deux mondes (start-up et collectivité) aux modes de faire très différents qui se sont rencontrés. Ce n’a pas été un travail simple. Là où les start-up doivent être souples pour s’adapter à toutes situations, les collectivités doivent composer avec de nombreuses contraintes, souvent comptables et juridiques dans le cas du crowdfunding.”
Une aventure collective
L’un des objectifs de départ était que les activateurs montent en compétences grâce à l’accompagnement mais aussi au pouvoir du collectif, du faire-ensemble et du partage d’expérience. Cette expérimentation a par ailleurs permis de créer une “compétition saine” et de stimuler un esprit coopératif et participatif. Au résultat, près de 90 % des porteurs de projets ont vécu cette expérience collective comme un vrai plus dans la conduite de leur projet.
Gaëlle et Elisabeth, deux porteurs de projet accompagnés, en témoignent : “J’aimerais continuer à rencontrer les porteurs de projet ensuite. L’idée serait de continuer à se motiver les uns les autres, croiser nos expériences, nos réseaux, nos regards, avoir des analyses de pratique.” “Toutes perspectives d’échanges, d’émulation, et de retours d’expériences sont bénéfiques dans ce type d’expérimentation. Nos projets se « nourrissent » d’une certaine façon et grâce à leur complémentarité, ils ne peuvent que nous conforter dans nos choix d’innover”.
Des clés pour la suite ?
Cette expérimentation nous a permis d’identifier des clés pour que les collectivités soient en mesure de soutenir plus de projets en s’emparant du financement participatif et en mobilisant les citoyens. La collectivité joue déjà un rôle majeur dans le financement de ces projets mais ne peut pas porter seule le risque, et ne possède pas les moyens financiers pour l’ensemble des projets émergents.
Le financement participatif permet de démultiplier les moyens de la collectivité et de laisser le choix de la prise de risque aux citoyens. Le fait que les citoyens jugent qu’un projet n’est pas suffisamment pertinent pour être financé peut devenir un indicateur stratégique pour la collectivité. On va donc au-delà des logiques de budget participatif : le citoyen donne son avis sur l’utilisation du budget de la collectivité en s’engageant financièrement à ses côtés.
Il nous semble donc très pertinent que les collectivités s’emparent du financement participatif. La majorité des porteurs de projet accompagnés considère aujourd’hui que les collectivités doivent le faire afin de soutenir l’ensemble des projets qui ont du sens pour le territoire : “le financement participatif révèle une nouvelle forme d’investissement et d’engagement citoyen dont les collectivités ne peuvent échapper à cette évolution des nouveaux usages liés à l’argent public”.
Toutefois le crowdfunding ne doit pas devenir le seul levier d’action et “ne doit pas être perçu par les habitants comme un signe de désengagement progressif des collectivités dans le financement de projets utiles à la société et porteurs de sens”. Il faudrait par ailleurs aller au-delà des logiques de don, qui véhiculent le mauvais message : “cela reste assez sensible de demander à des citoyens de financer des projets alors que ceux-ci paient déjà des impôts pour le fonctionnement de la collectivité”.
Le prêt ou l’investissement participatif sont donc à privilégier, mais il y a un enjeu d’accessibilité, aussi bien en termes de montants que de la complexité des dispositifs. Sans vouloir trop prêcher pour notre paroisse, avec le financement en royalties, c’est possible et simple, grâce à un montant d’investissement minimum de 10 € et un retour sur investissement trimestriel ! 😉
Nous vous invitons à consulter notre cahier d’acteurs rédigé dans le cadre du Grand Débat.